Le temps des récoltes est terminé depuis un moment et le gris s’est installé. Les nuits froides sont arrivées. Le rythme de la nature a ralenti, le tempo est donné par le decrescendo d’une lumière si douce, qui laisse désormais beaucoup plus d’espace à une noirceur si enrobante. Nous nous sentons différemment, une sorte d’émotion connue, avec le spectre de l’inconfortable qui traîne, celle de l’aube des petites morts. Pourtant, nous le savons bien que c’est dans l’ordre parfait des choses, ou se peut-il que nous l’ayons oublié?
La sève qui a glissé vers le bas, la vie chamarrée qui est tombée des arbres, qu’on a pourtant contemplé avec l’œil émerveillé d’un enfant; puis le vide s’est glissé dans le paysage, et la beauté a semblé s’envoler au loin, à peu près en même temps que le chant des bernaches.
Le cycle des saisons, dans notre bout du monde, est un équilibre parfait et la sagesse même qui coule dans nos veines et qui fait vieillir notre peau.
Le printemps et sa naissance, l’été et son effervescence, l’automne et sa transformation, l’hiver et ses petits morts.
Et si dans ces petites morts, il y avait déjà les renaissances du printemps?
Comme la fleur qui fane, mais qui offre à l’univers l’abondance d’un renouvellement, par ses graines.
L’hiver est un temps lent, un temps de régénérescence; un temps de gratitude pour tout ce qui l’a précédé.
L’hiver est l’annonce subtile de petites vies nouvelles. Le temps où l’on choisit ce qu’on a envie de semer pour la nouvelle année, ce qu’on désir sentir germer en nous et à l’extérieur de nous, ce qu’on souhaite contempler pousser et fleurir parce que nous en prenons soin. Puis pour le reste, c’est la foi en une moisson nourricière.
L’hiver est le temps de clarifier notre vision.
Rappelons-nous que le solstice d’hiver est la promesse d’une luminosité croissante, même s’il marque aussi le début de cette saison froide, scintillante et précieuse dans toute sa force et sa vulnérabilité.
Et voilà, une autre beauté s’est installée, celle de la pureté d’un flocon de neige, étendue partout sur nos paysages.
Et si l’hiver c’était juste ça, une autre beauté, une autre étape de la vie en constant mouvement?
Je vous souhaite des petites perles de morts qui feront scintiller vos espaces sombres, et où la lumière pourra y danser, avec le temps qui passe.
avec Amour,
Ka